2015
E-réputation : 4 leçons à retenir concernant le nettoyage judiciaire d’avis négatifs pour 2015/2016
Matthieu CORDELIER / 0 Comments /Toutes les entreprises sont visées par des avis négatifs sur internet, et pas seulement les hôtels qui sont en outre confrontés à des avis de clients effectifs, sur des portails tels que Hotels.com, Booking ou Tripadvisor, à l’inverse de nombreux autres sites hébergeant des avis d’internautes. Ces avis sont pourtant souvent moins contrôlés, excessifs voire parfois totalement diffamatoires ou dénigrants pour l’entreprise. Il n’est pas impossible de réagir à et de nettoyer des avis négatifs, mais la tâche est devenue plus difficile en 2015 qu’auparavant : la loi n’a pourtant pas changé ; c’est le contrôle du juge des requêtes qui s’est resserré. Voici les 5 leçons à retenir dans ce nouveau contexte.
1. L’effacement à première demande doit prendre la forme d’une notification LCEN.
Bien entendu, les entreprises peuvent faire le choix de recourir d’abord à une solution amiable, en utilisant les outils de « plainte » ou de « modération » présents sur de nombreux portails, ou en passant par l’administrateur du site, avec des chances de succès parfois très approximatives (mais dans certains cas cela fonctionne, il ne faut donc pas s’en priver) pour demander la suppression de l’avis.
A défaut, il convient avant toute démarche judiciaire, d’adresser une mise en demeure mise en forme selon les prescriptions de l’article 6 de la LCEN. C’est indispensable, et le juge exigera que cette démarche soit accomplie avant qu’on viennent le saisir, car le principe de cet article de loi est que la personne s’estimant victime d’un avis négatif ou d’un faux avis sur internet doit d’abord saisir l’hébergeur d’une demande de retrait de cet avis négatif, de manière formelle.
2. Lors d’une première requête, le juge n’ordonnera l’effacement que des contenus d’une particulière gravité
C’est cela qui a changé : la lecture de l’article 6 de la LCEN permettait, il n’y a pas si longtemps, d’obtenir l’effacement d’un avis négatif dès lors qu’on démontrait le caractère illicite de l’avis négatif litigieux, un préjudice à faire cesser, et le refus de l’hébergeur de supprimer l’avis au mépris de la LCEN.
Aujourd’hui, en remettant la protection de la liberté d’expression en avant, le juge refuse d’effacer un avis négatif, même clairement dénigrant, diffamant ou injurieux, dès lors qu’il n’est pas rapporté la preuve que l’auteur du message litigieux n’est pas identifiable.
3. La condition d’effacement des contenus après l’échec d’identification de l’internaute : une procédure plus longue
L’effacement de l’avis négatif pourra donc avoir lieu : sur requête, s’il est rapporté la preuve que l’auteur de l’avis litigieux n’est pas identifiable, ou par voie d’une action au fond (action en diffamation, injure ou responsabilité civile) s’il s’avère qu’une identification a été rendue possible.
Il est bien évident que de soumettre l’effacement d’un avis négatif à la condition que soit rapportée la preuve de l’impossibilité de son identification rallonge considérablement les délais permettant d’introduire une procédure, ce qui a un impact sur le choix du procès au fond à intenter si l’auteur de l’avis négatif est identifié.
4. Pour l’action au fond, préférer l’action en dénigrement à l’action en diffamation
Bien souvent, lorsqu’on obtient l’identification de l’auteur, il est trop tard pour agir sur le terrain du droit de la presse (c’est à dire, essentiellement, pour cause de diffamation ou d’injure, s’agissant d’avis négatifs sur des produits ou services d’entreprises), puisque le délai de prescription n’est que de 3 mois à compter de la première publication du message litigieux.
De plus, l’action en diffamation suppose de rapporter la preuve du caractère erroné / faux du texte de l’avis négatif, de l’atteinte à l’honneur et à la réputation de l’entreprise, tout en s’affranchissant du risque de rapport de preuves de vérité par l’auteur des propos.
A l’inverse, dans un procès en dénigrement, fondé sur l’article 1382 du Code civil, il suffit que l’avis négatif porte atteinte à l’image de l’entreprise, afin de détournement de clientèle, en usant de critiques, mêmes exactes, à l’encontre d’un produit ou service désigné ou identifiable, peu important que le message soit publié par une personne concurrente ou non l’entreprise visée. De plus, l’action en dénigrement se prescrit par 5 ans : elles est donc plus facile à mettre en oeuvre qu’une action en diffamation.
2015
La CEDH valide le principe de responsabilité « LCEN » des hébergeurs pour les avis et commentaires d’internautes
Matthieu CORDELIER / 0 Comments /La Cour Européenne des Droits de l’Homme, par un arrêt pris en Grande Chambre, en date du 16 juin 2015, a jugé que la loi « SSI » estonienne (loi sur les Services de la Société d’Information) était conforme à l’article 10 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Hommes et des Libertés Fondamentales (CDHLF) sur la liberté d’expression.
Or, la loi « SSI » estonienne, au même titre que la loi « LCEN » française, s’inscrivent dans la droite ligne des directives « SSI » 98/34/CE et « commerce électronique » 200/31/CE, comme le rappelle la Cour Européenne. Ce qui vaut pour la loi estonienne vaut donc pour la loi française.
A ce titre, cet arrêt souligne que les éditeurs de contenus, qui sont aussi hébergeurs de commentaires ou d’avis d’internautes sur ces contenus, ont une responsabilité limitée mais certaine, non seulement quant au prompt retrait des commentaires excessifs dépassant le cadre de la liberté d’expression, et à plus forte raison lorsque ces éditeurs-hébergeurs ne s’assurent pas de moyens réalistes pour tenir les auteurs desdits commentaires / avis responsables de leurs propos.
Pour arriver à cette solution, la Cour souligne bien que la législation estonienne, comme la législation française, met en avant le principe de liberté d’expression et de responsabilité limitée des hébergeurs de contenus, sans aucune obligation de contrôle a priori des informations hébergées.
Principe de liberté d’expression sauvegardé, pas de contrôle a priori, responsabilité limitée des hébergeurs
Dans la législation estonienne, poursuit la Cour dans son analyse, seuls sont susceptibles d’être poursuivies les atteintes à la personnalité, la diffusion d’informations fausses, et la responsabilité pour faute [süü] équivalent de notre article 1382 du Code civil.
Or, c’est exactement le type de législation préconisée par le Conseil de l’Europe dans sa Déclaration sur la liberté de la communication sur l’Internet du 28 mai 2003, texte qui est désormais consacré par l’important arrêt de la CEDH.
En effet, dans la déclaration du 28 mai 2003, le Conseil de l’Europe précise notamment que « Afin d’assurer une protection contre les surveillances en ligne et de favoriser l’expression libre d’informations et d’idées, les États membres devraient respecter la volonté des usagers de l’Internet de ne pas révéler leur identité. Cela n’empêche pas les États membres de prendre des mesures et de coopérer pour retrouver la trace de ceux qui sont responsables d’actes délictueux, conformément à la législation nationale, à la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales et aux autres traités internationaux dans le domaine de la justice et de la police« .
Que la CNIL se le tienne pour dit, depuis plus de 12 ans : il ne serait pas illégitime de conserver des données sur les utilisateurs de services en lignes, même à titre gratuit, pour leur identification future de l’auteur d’un éventuel délit ou d’une éventuelle atteinte aux droits d’un tiers. Cela n’est toutefois pas prévu (ou du moins pour une durée bien trop limitée) par le cadre légal sur la conservation des données personnelles, telle qu’encadrée par la CNIL dans ses précieuses déclarations CNIL que nous connaissons tous.
Responsabilité en cas de retrait tardif et de défaut de moyen d’identification de(s) (l’) auteur(s) de l’infraction ou de l’atteinte
Quant au contrôle – a posteriori – après signalement d’un contenu illicite, le Conseil de l’Europe détaille les moyens que peuvent employer les éditeurs de contenus qui hébergent également les commentaires ou avis des internautes sous leurs publications.
Enfin, la Cour rappelle les dispositions de la Directive « Services de la société de l’information » 98/34/CE dans la droite ligne de laquelle se situent les législations estoniennes et française.
En conséquence, l’arrêt relève notamment que l’insuffisance des mesures prises par la société d’édition requérante : 1) pour retirer sans délai après leur publication les propos litigieux ; et 2) pour assurer une possibilité réaliste de tenir les auteurs des commentaires pour responsables de leurs propos ; est susceptible d’engager la responsabilité d’un éditeur-hébergeur sans que ce dernier puisse arguer de la violation par la législation de son pays de l’article 10 de la CDHLF.
2014
Faire effacer/supprimer des contenus sur internet : FAQ ereputation
Matthieu CORDELIER / 0 Comments /Un contenu me concernant ou concernant mon entreprise a été posté sur internet : puis-je le faire supprimer ?
La question de l’effacement d’une information, d’une image ou d’une vidéo est directement liée à la qualification du type d’atteinte portée aux droits de la personne visée (qu’elle soit une entreprise ou une personne physique).
Afin de demander une suppression de contenu, il faut prouver qu’un préjudice est subi par la personne estimant être victime de l’indélicate publication internet… et, surtout, il faut démontrer l’abus commis par la personne ayant publié le contenu litigieux.
Sans abus, pas de retrait : c’est la protection de la liberté d’expression qui le veut.
Pour qu’il y ait « atteinte », il faut d’abord que la victime soit nommément citée, identifiée, aisément identifiable ou s’agissant d’une photo ou d’une vidéo aisément reconnaissable.
Lorsque la victime est nommément citée (nom et prénom), la question de l’atteinte ne pose aucune difficulté, étant entendu que la citation du seul prénom de la victime peut, dans certaines circonstances, suffire (personne célèbre ou photos accompagnant commentaire, par exemple).
Lorsque la personne n’est pas clairement nommée, il faut qu’elle soit identifiable (informations relatives à des faits ou une société suffisant à identifier une personne physique, un dirigeant de société, par exemple) ou aisément reconnaissable (photos ou vidéos prises en qualité et distance suffisante pour distinguer les traits du visage ou un élément d’identification caractéristique).
Le critère est alors apprécié souverainement par le juge.
Quels types d’atteintes / de préjudices / d’abus doivent être en jeu pour permettre le retrait d’une publication sur internet ?
L’atteinte doit être caractérisée, d’une part, par un préjudice certain et prouvé, et d’autre part, par un abus commis par la personne ayant posté le message, l’avis, la photo ou la vidéo litigieuse.
Les cas les plus fréquents sont notamment l’injure et la diffamation d’une personne nommément désignée. Le préjudice, dans ce cas, est une publication nuisant à l’honneur et à la considération (préjudice moral). L’abus quant à lui se caractérise par le caractère outrageant de l’injure ou le caractère non prouvé des déclarations faites (ndla : « non prouvé » ne signifie pas forcément que c’est faux, mais qu’il est impossible d’apporter une preuve de vérité).
Viennent ensuite les photos ou vidéos de personne physiques, prises dans l’intimité de leur vie privée (atteinte à l’image de la personne), au rang desquelles l’atteinte la plus fréquente demeure la photographie ou la vidéo prise par un ex et mise en ligne sur internet. Ces contenus sont généralement accompagnés de commentaires incluant le prénom voire le nom de la personne nue y figurant et il n’est donc pas difficile de démontrer le préjudice subi.
L’abus, dans ce deuxième cas de figure, consiste à ne pas avoir reçu d’autorisation préalable afin de la fixation/captation, de l’enregistrement ou de la transmission de l’image d’une personne.
Enfin on trouve, également, des cas de concurrence déloyale (par dénigrement) commis par des concurrents d’une entreprise qui postent, par exemple, des « faux » avis sur des sites permettant de créer des fiches d’évaluation des produits ou services de différents secteurs d’activité.
Ces cas sont toutefois plus rarement prouvé, en raison notamment de la difficulté d’obtenir l’identité de l’auteur des propos dénigrants.
Dois-je nécessairement faire un constat d’huissier ?
Si des poursuites civiles ou pénales sont envisagées, oui, c’est absolument nécessaire.
Avec les échanges de courriels, c’est le seul mode de preuve recevable en justice, les captures d’écrans ou les impressions de pages sur imprimantes ou, pire, dans un fichier PDF n’étant absolument pas considérée comme un mode de preuve recevable devant Cours et Tribunaux.
Ainsi si un retrait est demandé de manière judiciaire, un constat est indispensable et il doit être fait préalablement à toute notification de demande de retrait et/ou à toute saisine du juge.
Le constat d’huissier n’est pas indispensable dans l’unique hypothèse où l’on sait que l’on agira pas contre l’auteur des contenus litigieux et qu’on ne fera pas de demande de suppression de contenu auprès du juge.
Or, il est de plus en plus fréquent de devoir recourir au juge afin d’obtenir le retrait d’information portant atteinte à l’honneur ou à la vie privée / image d’une personne.
Il est donc fortement conseillé de faire réaliser par un huissier un constat reprenant : les constatations de bases des faits, propos et/ou vidéos alléguées (avec des captures d’écran réalisées par l’huissier).
Peut-on saisir immédiatement le juge d’une demande de suppression de contenu ?
En principe, oui, on peut saisir le juge dès qu’un constat d’huissier est réalisé.
La loi dite « LCEN » de 2004 permet en effet de saisir le juge sur requête ou en référé afin de demander toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne.
Cela signifie qu’il est possible, en principe, de demander le retrait d’un commentaire, d’un article de blog, d’un post sur un forum, d’une vidéo ou d’un photo sur tout site ou réseau social, en demandant une simple ordonnance au juge.
Toutefois, en pratique, les juges exigent de manière quasi systématique que la victime (ou son avocat) ait préalablement notifié à l’éditeur ou à l’hébergeur du site internet ou de réseau social concerné une demande de suppression dans les formes et conditions édictées par la loi dite « LCEN ».
Dans quels délais doit-on agir ?
Lorsque les propos publiés sur internet consistent en une provocation à la commission de certains délits, une diffamation ou une injure le délai imposé par le droit de la presse pour agir en responsabilité est très court : il est de trois (3) mois à compter du premier jour de la première publication (mise en ligne ou publication presse) du contenu litigieux.
Dans les autres cas, le délai pour agir varie de 3 à 5 ans à compter de la publication.
Pour demander l’effacement d’une publication, même si cette publication relève du régime du droit de la presse (délai de 3 mois pour agir en responsabilité), la LCEN ne précise pas qu’il faille être dans le délai de 3 mois.
Toutefois, en pratique, de nombreux magistrats exigent, pour protéger la liberté d’expression, qu’on soit toujours dans le délai de 3 mois, même pour faire jouer une simple demande de suppression de contenu.
A mon sens, cette exigence des magistrats est excessive, notamment au regard de la spécificité d’internet (ndla : cf. le fait que « n’importe qui » peut publier dans l’anonymat, ce qui n’est pas du tout le cas des organes de presse soumis à une responsabilité en cascade et à des mesures de publicité obligatoire).
Combien coute une demande de suppression ?
Le coût d’une demande de suppression commence à 80 EURO TTC (hors frais de timbres postaux) en fonction du nombre de publications à supprimer. Et l’enveloppe moyenne, procédure judiciaire de demande de retrait incluse (par voie de requête) se situe aux alentours de 1160 EURO TTC.
Ces montant peuvent varier substantiellement, notamment lorsqu’on doit procéder par voie de requête(s) afin d’ordonnance(s)… en fonction des difficultés rencontrées et du nombre de requêtes que l’avocat est contrait de déposer plusieurs requêtes.
En tout état de cause, de nombreuses assurances couvrant l’habitation ou les locaux professionnels prévoient des polices « assistance juridique/judiciaire » et une partie des frais de l’avocat peuvent être pris en charge par l’assureur (environ 600 EURO TTC pour une procédure de type « référé » ou « autre demande devant le Président du TGI »).
En tout état de cause, il faut savoir que certaines sociétés de droit étranger sont parfois rétives à exécuter une ordonnance du juge rendue sur requête et qu’une seule ordonnance sur requête ne suffit pas toujours pour obtenir l’effacement ou du moins la disparition des informations concernées.
En fin de course, contrairement à ce qu’indique la loi (LCEN), il n’est quasiment jamais possible de demander le bannissement d’une adresse IP, d’une adresse URL ou d’un serveur auprès des opérateurs de téléphonie (ADSL et mobile) pour empêcher l’accès à des informations préjudiciables hébergées à l’étranger, sur des sites qui ne se conforment pas à la réglementation française et aux décisions de justice françaises.
A ce jour seule l’ARJEL dispose d’un tel pouvoir, car il est assorti de l’obligation de payer les frais des opérateurs au titre de telles opérations de bannissement qui ont un coût substantiel.
Il faut savoir enfin que les requêtes afin d’ordonnance ne sont pas contradictoires (il n’y a pas de partie adverse, mais seulement l’avocat de la victime qui présente des demandes au juge).
Par conséquent, certains magistrats sont très prudents (voire un peu trop prudents) quant à l’octroi (ou non) des mesures préventives sollicitées.
Cela produit parfois des situations de déconvenues surprenantes au détriment de certaines victimes.
Un procès peut-il valoir le coup (ou le coût) ?
Une procédure classique (au fond ou en référé) suppose le respect du contradictoire, un calendrier procédural plus long, et l’observation de règles de fond, de forme et de procédure particulières.
Ces procédures sont donc plus longues et plus couteuses en honoraires d’avocat (selon les cas de figure, la complexité de l’affaire et la durée de la procédure).
Dans le cadre d’une procédure contradictoire, à l’inverse des procédures sur requête afin d’ordonnance, le demandeur peut certes solliciter une indemnité au titre de l’article 700 Cpc (au civil) ou de l’article 475-1 du Cpp (au pénal), ce qui correspond notamment aux frais d’avocat liés à la procédure.
Toutefois, la condamnation est souvent symbolique par rapport aux honoraires réellement acquittés à l’avocat, surtout face à un particulier, et à plus forte raison si ce dernier dispose de faibles revenus.
De plus, la capacité de recouvrer les condamnations, y compris les frais de procédure et d’honoraires d’avocat, est souvent très limitée, surtout lorsque l’atteinte est commise par un particulier dont la surface financière est limitée.
Il faut donc avoir de bonnes raisons et notamment une solide envie de faire payer l’autre, quelqu’en soit le prix, car il ne s’agit pas ici de récupérer, comme certaines victimes le croient parfois de copieux dommages intérêts. C’est plus souvent l’inverse qui se produit, sans compter que pour une bête question de preuves ou de procédure, on peut aboutir à une décision déboutant le demandeur…
Cependant, dans le cadre d’une procédure contradictoire, même en référé, les juges accordent des mesures beaucoup plus contraignantes que dans le cadre d’une procédure d’ordonnance sur requête.
Il y a donc, dans certains cas, un intérêt à recourir notamment au référé afin d’obtenir l’effacement des contenus litigieux, sous astreinte, voire avec l’octroi d’une provision sur dommages intérêts. Ce cas de figure se retrouve notamment dans le cas où un éditeur négligeant omet de satisfaire à une notification LCEN éventuellement suivie d’une ordonnance ordonnant la suppression d’une information, d’une photo ou d’une vidéo.
Faut-il recourir aux services d’une société de nettoyage de e-reputation ?
La procédure de suppression des contenus est parfois longue, surtout lorsque les décision obtenues doivent être exécutées par des sociétés de droit étranger.
Pour prendre un exemple, un société de droit américain gérant un gros moteur de recherche peut parfois obtempérer à une demande faite par courrier A.R. après un délai de plus d’un mois et demi. Parfois, c’est plus rapide, mais c’est loin d’être systématique.
Dans d’autres cas la suppression par des voies juridiques n’est tout simplement pas possible (soit parce qu’il n’est pas possible d’identifier l’éditeur du service, soit parce que les fournisseurs d’accès français ne peuvent pas limiter l’accès à un service ou un serveur ou une adresse IP sans porter préjudice à d’autres services ou d’autres contenus non concernés par la demande).
Dans ce cas, des sociétés comme NET OFFENSIVE proposent des solutions pour « nettoyer » ou du moins dissimuler certaines informations dans les résultats des moteurs de recherche.
Dans tous les cas, il faut utiliser les services d’une société de nettoyage de eréputation qui est assistée d’un avocat connaissant bien la matière car, seule, elle ne pourra aucunement obtenir les mesures et les décisions de justice que seul un avocat peut soutenir.
2013
eRéputation & Dénigrement : toute divulgation critique à l’égard d’un concurrent, même justifiée par une non-conformité, est susceptible de constituer un dénigrement
Matthieu CORDELIER / 0 Comments /Par un arrêt du 24 septembre 2013, la Cour de cassation vient de juger que la critique formulée à l’encontre d’un produit ou service d’un concurrent engage la responsabilité de son auteur au titre de concurrence déloyale par dénigrement, peu important que la critique formulée soit fondée et avérée.
La Cour de cassation rappelle en outre que les juges du fond ont tout loisir de prononcer une mesure de publication judiciaire, en sus des dommages-intérêts alloués à la victime, dans l’exercice de leur pouvoir souverain, si cette mesure étant jugée propre à réparer le préjudice subi par la campagne de dénigrement.
Dans cet arrêt, la Cour estime en effet que la divulgation d’une information de nature à jeter le discrédit sur un concurrent constitue un dénigrement, peu important qu’elle soit exacte.
Les faits de cette jurisprudence sont relativement simples et transposables à toute matière.
Dans le cas d’espèce, une société commercialisant des bouteilles de butane d’un format particulier (190 gr) s’est aperçue que l’un de ses concurrents commercialisait un produit ne répondant pas aux normes en vigueur pour ce type de bouteilles de gaz pour appareils de camping.
Croyant être dans son bon droit, cette société a adressé des courriers à différents distributeurs pour les informer de cette non-conformité.
C’est en cette communication que la Cour de cassation a estimé qu’il y avait dénigrement.
Il est intéressant de noter que l’auteur du dénigrement, dans ses conclusions, expliquait qu’il n’avait pas averti la DGCCRF, au motif : que « l’intervention de cette dernière aurait été différée et partielle » ; et qu’une telle saisine aurait été peu adaptée à la situation, exposant à des sanctions des sociétés qui étaient par ailleurs ses clientes.
On comprend bien ce que voulait indiquer cette société et elle a partiellement raison dans la mesure ou la DGCCRF n’a pas toujours une action aussi coercitive qu’on pourrait le souhaiter.
Malheureusement l’argument apparait toutefois un peu maladroit dans la mesure où il souligne que l’auteur du dénigrement a visé un concurrent d’une attaque tout en protégeant ses propres partenaires.
C’est précisément un des critères d’un comportement déloyal.
Sur la réparation du préjudice, la Cour de cassation nous apporte là aussi un éclairage intéressant.
La défenderesse à la cassation expose que l’octroi et de dommages-intérêts et d’une mesure de publication au profit de la victime et non seulement excessif, mais également qu’une telle publication n’est prévue par aucun texte.
L’argument invoqué fait implicitement référence aux articles L.331-1-4 (en matière de droit d’auteur et bases de données), L.521-8 (en matière de dessins et modèles), L.615-7-1 (en matière de droit des brevets) et L.716-15 (en matière de droit des marques) du Code de la propriété intellectuelle.
En effet, dans ces matières, la réparation / sanction par mesure de publication de la décision de justice ou d’un extrait de celle-ci peut être ordonnée.
L’argument est intelligent : il consiste à soutenir qu’une mesure de publication est une forme de sanction, non prévue par la loi (et notamment une loi pénale, une incrimination), et par conséquent illicite.
Toutefois, la réponse de la Cour à ce moyen n’est pas moins habile.
La réponse de la Cour revient à dire de manière synthétique : non, il ne s’agit pas d’une sanction, mais d’une mesure de réparation décidée souverainement pas les premiers juges.
Il résulte de cette très intéressante jurisprudence que la critique, même objective et avérée, sur un produit ou un service d’un concurrent (frappé de non conformité, voire même d’une autre tare plus grave) est susceptible d’être qualifié d’acte de concurrence déloyale par dénigrement.
L’autre enseignement s’apparente au « retour de bâton » : celui qui a voulu être arroseur, se retrouve arrosé… et dans des proportions bien plus importantes, puisque quelques correspondances privées ont valu à leur malheureux auteur d’être cloué au pilori sur la place publique.
En effet, dans le cas d’espèce pour deux ou trois courriers adressés à des professionnels du secteur, l’auteur du dénigrement voit un extrait du jugement à son encontre publié sur son propre site internet ainsi que dans deux magazines, le tout à ses frais, bien entendu.
La sanction a de quoi faire réfléchir.
2013
eReputation : atteinte à la vie privée, diffamation, injure, dénigrement : comment faire supprimer des contenus sur internet ?
Matthieu CORDELIER / 0 Comments /De nombreux particuliers et chefs d’entreprise s’interrogent sur la meilleure méthode pour nettoyer sa e-reputation ou faire supprimer des faux-avis de consommateurs.
Faire effacer efficacement de tels faux-avis, propos dénigrants, photos ou vidéos exposant l’intimité d’une personne, contenus diffamants ou injurieux sur internet nécessite une mise en oeuvre rapide d’une série d’actes juridiques précis.
PRIVILEGIER LA VOIE « AMIABLE »
Comme déjà exposé dans un article précédent, de nombreux sites proposent des systèmes de modération permettant à tout intéressé de demander aux administrateurs du site de retirer un contenu offensant ou portant atteinte à ses droits (marque, droit d’auteur…) ou libertés (vie privée notamment).
C’est la première voie à explorer car, dans de nombreux cas, cela apporte une solution rapide et gratuite.
La personne s’estimant victime d’un contenu offensant ou lui portant préjudice, devra cependant prendre soin de savoir quels sont les droits impliqués par sa demande de suppression, car une demande mal formulée n’est pas prise en compte.
Certaines victimes nous ont même déjà exposé des cas de refus d’effacement de contenus alors que la violation d’un droit était indiscutable et que la demande était parfaitement fondée.
Il faut alors recourir à une demande de suppression plus formelle.
LA MISE EN DEMEURE / LE COURRIER D’AVOCAT
Si la voie amiable n’a rien donné, la loi de confiance dans l’économie numérique prévoit que la personne s’estimant victime d’une publication faite sur internet peut adresser à l’hébergeur une notification lui exposant les faits, les préjudices et lui demandant l’effacement des contenus portant atteinte à ses droits.
Cette notification est assez formelle et elle est le point de départ d’une éventuelle procédure.
Il est donc préférable de recourir aux services d’un avocat pour s’assurer du bien fondé des demandes formulées.
Pour donner un exemple concret : dans le cadre d’une atteinte à la vie privée (article 226-1 du Code pénal) et d’une usurpation d’identité par le détournement du compte d’un réseau social d’une utilisatrice (article 226-4-1 du Code pénal), une simple mise en demeure d’avocat a suffit pour obtenir la suppression du compte en question en quelques jours seulement.
La société de droit américain concernée n’a fait aucune difficulté pour s’exécuter sur ce réseau social professionnel bien connu en France.
Ce pendant, même avec l’aide d’un avocat, il faut reconnaitre que dans de nombreuses situation, ces notifications LCEN ne sont pas toujours efficaces.
Mais la notification LCEN devient de plus en plus un pré-requis indispensable à la suite de la procédure si cette notification de demande de suppression de contenu n’est pas exécutée.
En effet, pour obtenir le retrait d’une publication, certains magistrats – statuant sur une demande de suppression d’une publication internet – exigent, à titre de pré-requis, que cette notification ait été effectuée dans les formes requises par la loi (article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique).
Or, la façon dont a été demandé le retrait des contenus litigieux va nécessairement avoir une influence sur la suite de l’éventuelle procédure.
LA DEMANDE NON CONTRADICTOIRE (sans procès) DE SUPPRESSION DE CONTENU AUPRES D’UN JUGE
La loi de confiance dans l’économie numérique est claire : tout intéressé peut demander assez aisément le retrait d’un contenu lui portant préjudice, y compris par voie d’ordonnance rendue sur requête.
Cela signifie que, selon les circonstances et l’urgence de la situation, il est possible d’obtenir une ordonnance sous 24 heures (ouvrées).
Nous avons pu constater que les magistrats autorisaient assez aisément des suppression de contenus lorsque la notification LCEN était correctement faite au préalable.
Dans certains cas, la demande de suppression peut même être sollicitée sans notification LCEN (photos ou vidéos intimes postées par un ex, propos injurieux bientôt frappés de prescription…).
Les juges disposant d’un pouvoir souverain d’appréciation, il ne faut toutefois pas s’attendre à l’obtention systématique d’une ordonnance afin de suppression des contenus.
L’EXECUTION DE LA DECISION DE JUSTICE
La difficulté en matière d’internet est que de nombreux éditeurs de services de communication au public en ligne sont proposés par des sociétés étrangères.
Or, il faut souligner que les délais d’acheminement et de traitement d’un courrier sont relativement long à l’international.
Cependant, les sociétés exploitants les blogs, moteurs de recherche ou les réseaux sociaux les plus connus ne sont pas forcément les plus rétives à l’exécution d’une décision de justice.
C’est davantage la lourdeur de leur services administratifs qui ralentit l’exécution des décisions.
Par exemple, une ordonnance rendue le 03 juin 2013 par le Président du Tribunal de grande instance de Paris a commencé à être exécutée le 24 juin 2013 par une société américaine gérant notamment un moteur de recherche de premier plan.
Les délais peuvent donc parfois être long, trop long pour celui qui est victime d’une diffamation.
La meilleur méthode, par conséquent, est d’agir vite si la démarche auprès du modérateur du site internet concerné n’a pas satisfait à la demande ou tarde à le faire.
C’est d’autant plus vrai si la victime, outre le retrait des contenus litigieux souhaite également poursuivre leur(s) auteur(s).
2013
Le nom de domaine doit être distinctif pour assurer une protection et le NDD descriptif peut engager la responsabilité de son exploitant
Matthieu CORDELIER / 0 Comments /C’est l’idée qui ressort des dernières jurisprudences en la matière : un nom de domaine ayant un caractère descriptif ne permet pas à son titulaire d’agir en concurrence déloyale à l’encontre de l’entreprise concurrente qui enregistrera le même nom de domaine ou un nom de domaine proche, même avec la même extension, visant le même territoire (voire la même localité).
Le nom de domaine descriptif ne confère aucun droit d’exclusivité et ne permet pas d’agir en concurrence déloyale
Dans un arrêt du 20 mars 2013, la Cour d’appel de Bastia avait en effet déjà statué sur la question en retenant notamment que « en vertu du principe de la libre concurrence, seul le titulaire d’un nom de domaine distinctif peut en rechercher la protection sur le fondement de l’article 1382 du code civil au titre de la concurrence déloyale, l’enregistrement d’un nom de domaine auprès d’une autorité de nommage ne lui conférant aucun droit privatif ni le bénéfice d’aucun statut juridique propre. En effet, une entreprise ne peut par le biais de son nom de domaine se voir conférer ’un droit quasi exclusif’ d’exercer une activité, même sur un territoire délimité. »
Il s’agissait, en l’espèce, d’un conflit intervenant entre le déposant du nom de domaine « mariagesencorse.com » et la déposante du nom de domaine « mariageencorse.com ».
Le premier déposant, s’imaginant sans doute que le premier arrivé est le premier servi et qu’il est forcément protégé juridiquement, estime être victime d’usurpation de son nom de domaine ’mariagesencorse.com’.
Il demande donc réparation sur le fondement de l’article 1382 du Code civil, estimant avoir subi une atteinte préjudiciable à son nom de domaine, constitutive de concurrence déloyale et de parasitisme.
Le Tribunal de commerce d’Ajaccio, s’estimant compétent à tort pour juger de ce contentieux en droit des marques (même portant sur la question connexe des actes de concurrence déloyale), donne raison au demandeur.
La Cour d’appel de Bastia retient quant à elle qu’il n’y avait pas de ressemblance entre les deux sites concurrent et que le site « www.mariagesencorse.com est une juxtaposition d’un mot usuel et d’une provenance ou d’un lieu géographique, qui évoque l’objet et le lieu de l’activité de son titulaire sur internet. »
La Cour en déduit très justement que le simple dépôt auprès d’un registrar d’un nom de domaine descriptif ne confère aucun droit, ni aucun monopole à son titulaire, lequel se voit privé, subséquemment, de toute action en concurrence déloyale contre des sites internet ayant la même activités, même sur le même territoire et usant d’un signe descriptif très proche voire identique à titre de nom de domaine.
Le Tribunal de commerce de Paris, par un jugement du 24 mai 2013 a retenu une solution similaire à l’occasion d’un contentieux opposant les titulaires des noms de domaines « e-obseques.fr » et« i-obseques-paris.fr », le premier appartenant à une société privée et son gérant, demandeurs à l’instance, et l’autre à la ville de Paris, défenderesse.
Le Tribunal de commerce, à l’instar de la Cour d’appel de Bastia, retient également que la société privée et son gérant « ne peuvent revendiquer une protection qui aboutirait à leur reconnaitre un monopole d’utilisation d’un terme descriptif », outre le fait que les demandeurs « ne sont pas en mesure d’établir qu’une quelconque confusion soit possible entre le graphisme de leur site et celui de la société ».
Cette idée a d’ailleurs pour origine le fait que pour avoir une marque forte et qui pale d’elle même, il faut choisir un signe lequel, par définition, doit permettre de se distinguer des concurrents et non de se confondre avec.
Les critères permettant d’agir en concurrence déloyale au titre du plagiat d’un site internet
On notera, à ce titre, que ces solutions rejoignent celles déjà adoptées par le Tribunal de grande instance de Paris qui retient usuellement que l’imitation des fonctionnalités et la reproduction quasi-servile des conditions générales d’utilisation d’un site internet sont constitutives d’actes de concurrence déloyale (TGI, 3ème civile, 2ème Section, 15 mars 2013).
La solution de bon sens donne par conséquent une idée précise de ce que doit désormais relever l’exploitant d’un site internet pour poursuivre en concurrence déloyale un site concurrent :
– L’imitation d’un signe distinctif éventuellement déposé à titre de marque, de dénomination sociale et/ou de nom commercial ;
et/ou
– L’imitation d’un graphisme et/ou des fonctionnalités / conditions générales d’utilisation.
Ces critères ne sont pas nécessairement limitatifs, mais en l’absence de contrefaçon d’éléments de propriété intellectuelle, ils doivent servir de référence de base avant d’agir en concurrence déloyale contre un site internet concurrent.
Exploiter un nom de domaine descriptif peut être un acte de concurrence déloyale
Pour aller plus loin, rappelons que la Cour de cassation avait retenu, dans un arrêt du 04 mai 2012, que le fait (pour un avocat) d’enregistrer un signe descriptif à titre de nom de domaine (« avocat-divorce.com », en l’espèce) constituait « une infraction aux règles sur la publicité individuelle, ainsi qu’un acte de concurrence déloyale » (Cass. Civ. 1ère, 4 mai 2012, N° de pourvoi: 11-11180, publié sur Legifrance).
Le problème était par conséquent carrément inversé : c’est le déposant d’un nom de domaine descriptif qui aurait pu être attaqué pour concurrence déloyale par ses concurrents, non titulaires du même nom de domaine.
Certes cette jurisprudence s’applique à une profession réglementée (avocats)… néanmoins, l’argument, souligné par la Cour de cassation, consistant à soutenir qu’il y a concurrence déloyale du fait de l’enregistrement d’un nom de domaine descriptif est, à nos yeux, une invitation à ouvrir droit à poursuites à tout concurrent !
Contrairement à ce qu’on peut écrire faussement certains avocats, il n’est donc surtout pas question de course au référencement : au contraire, les noms de domaines génériques sont susceptibles d’engager la responsabilité de leur déposant et/ou de leur exploitant.
En effet, une telle jurisprudence dénote clairement une hostilité certaine de la haute juridiction à l’égard des signes descriptifs enregistrés à titre de nom de domaine.
Peut être que certains professionnels y verront une opportunité pour faire cesser des agissements de concurrents peu scrupuleux qui achètent des noms de domaines descriptifs à tour de bras pour « occuper l’espace » et acquérir de la visibilité.
Il se pourrait que le mouvement jurisprudentiel de ces derniers mois leur offre, en effet, une voie d’action.
Et ce serait logique puisqu’en droit des marques, tout intéressé peut invoquer à titre de moyen en défense la nullité d’un signe descriptif : il y a donc une certaine logique à neutraliser toute forme de monopole, quel qu’il soit, y compris s’agissant d’un nom de domaine descriptif quant à l’activité auquel il se rapporte.
En sus, cette hostilité rejoint la nouvelle (quoique de moins en moins « nouvelle ») politique de référencement de Google qui ne souhaite plus donner la part belle aux noms de domaine descriptifs, précisément afin d’éviter des abus en matière de référencement.
Il semble donc que l’achat de nom de domaines descriptifs pour être « bien vus » sur le net risque d’être « mal vus », non seulement par Google, mais également désormais, par les juridictions françaises.
2012
Cyber-harcèlement et e-réputation : vade-mecum
Matthieu CORDELIER / 0 Comments /La publication de contenus sur internet est devenue tellement facile qu’il n’existe plus de profil type du « cyber-harceleur ». Tout le monde peut être victime de cyber-harcèlement.
Toutefois, retrouver, sur internet, des photos ou des vidéos de soi, publiées par un « ex » ou par un tiers mal intentionné, n’est pas une fatalité insurmontable.
De même, diffamations et injures postées sur un blog peuvent être effacées, si l’on sait s’y prendre.
Nous vous proposons ici un vade-mecum des situations de cyber-harcèlement et des solutions existant pour nettoyer sa e-réputation et faire disparaitre des photos ou des vidéos intimes, des textes diffamants, injurieux et/ou dénigrants.
Il est même possible de retrouver et de poursuivre la personne ayant publié les contenus litigieux sur internet (même si certains croient parfois à tort qu’un pseudo leur confère anonymat et impunité).
La « e-réputation » se définit comme toute information disponible sur internet concernant une personne physique ou une entreprise.
Le « cyber-harcèlement » consiste à publier de manière répétée dans le temps et/ou sur un grand nombre de sites internet, des informations destinées à salir la e-réputation une personne physique ou morale.
A l’origine du mal, on notera toujours les mêmes (res)sentiments humains menant au délit : jalousie, rancune, racisme, sexisme, homophobie ou plus simplement un mécontentement.
Le plus souvent, les auteurs de cyber-harcèlement sont un ancien salarié, un ex-conjoint, un concurrent, un client mécontent, ou plus simplement un autre internaute croisé sur un réseau social, un site de rencontre ou un blog…
On retrouve même des <a href= »http://www.agircontreleharcelementalecole.gouv.fr/quest-ce-que-le-harcelement/le-cyberharcelement/ »>victimes de cyber-harcèlement dans les écoles</a> et les conséquences peuvent aller, dans des cas extrêmes, jusqu’à la tentative de suicide.
Le mode d’expression choisi est souvent le même et il se traduit par la publication sur internet d’un texte diffamant, injurieux ou dénigrant ; d’images relevant de la vie privée, parfois très intimes et dénudées…
Or, si chacun jouit d’une liberté d’expression, garantie par des textes constitutionnels, cette liberté connait certaines limites, à savoir notamment les droits et libertés de ceux qui pourront être visés par la publication internet litigieuse.
Il existe deux grands types d’atteintes qui constituent précisément ces limites à la liberté d’expression : les atteintes à l’honneur et à la réputation, et les atteintes à la vie privée.
Sur internet, injure et diffamation sont parmi les atteintes les plus fréquentes.
Les atteintes à l’honneur et à la réputation sont précisément encadrées par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, notamment aux articles concernant la diffamation et l’injure, lesquelles sont les atteintes (fautes pénales et quasi-délictuelles) les plus courantes en matière de e-réputation.
A noter : en matière de diffamation et d’injure, la loi sur la presse de 1881 est applicable aux délits commis sur internet.
Comme d’autres auteurs et praticiens, j’ai apporté une contribution très critique à ce propos, mais le régime juridique n’a pas encore évolué (voir mon article à propos du <a href= »http://www.cordelier-avocat.fr/news.php?id=regime-prescription-presse-internet »>régime contestable de la prescription des délits de presse sur internet</a>).
Il faut impérativement distinguer injure et diffamation.
La diffamation est une fausse accusation portant atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne.
L’injure est une expression outrageante, un terme de mépris ou une invective sans accusation précise.
Par exemple, qualifier quelqu’un « d’escroc », implique que l’on accuse une personne d’avoir commis des faits relevant d’un délit d’escroquerie. C’est donc une diffamation.
A l’inverse, les noms d’oiseaux et les termes ayant vocation à outrager, sans se référer à des faits ou des infractions précises sont des injures.
Par exemple, des expressions telles que « bandit » ou « voyou », dès lors que ces expressions ne sont pas liées à des faits précis, sont des injures.
A ce titre, il convient de souligner que la Cour de cassation a récemment rappelé, dans un arrêt de principe en date du mois dernier (C.cass. ass. plén. 15 fév. 2013, n°11-14.637), que la qualification entre injure et diffamation n’est pas cumulative et que chaque imputation doit faire l’objet d’une qualification précise.
Par conséquent, une injure n’est pas une diffamation et réciproquement, et on ne peut pas poursuivre l’auteur de la publication pour les deux qualifications simultanément concernant les mêmes propos.
Cet arrêt réaffirme la constante position de la Cour de cassation en matière de défense de la liberté d’expression et du respect des droits de la défense. Il démontre également que la recherche de la qualification juridique entre « injure » et « diffamation » relève d’une appréciation parfois complexe à départager.
La diffusion de photos et de vidéos est l’atteinte à la vie privée la plus fréquente.
Pour simplifier, l’atteinte à la vie privée est le fait de publier une photographie, une vidéo ou tout autre élément permettant d’identifier une personne physique sans y avoir été autorisé préalablement.
D’autres critères, tel un lieu privé ou public, ou la vie publique d’une personnalité peuvent jouer sur le caractère « privé » de ces éléments.
Les deux exemples les plus récurrents sur internet sont la publication de photos/vidéos volées (ou de clichés ou vidéos pris par l’auteur mais divulgués sans autorisation du sujet) et la publication de données d’identification ou de coordonnées privées (adresse, numéro de téléphone, etc.)
Dans la mesure où de telles publications sont répétées dans le temps et sur différents sites internet, on peut dès lors parler de <b> »cyber-harcèlement »</b>, quoique cette expression n’ait pas (encore) reçu d’écho jurisprudentiel.
La situation est malheureusement très fréquente et elle touche souvent des personnes après une rupture avec un ex-compagnon, amant ou conjoint (le féminin est ici grammatical, quoique statistiquement, les victimes sont très majoritairement des femmes).
En cas d’atteinte à la vie privée, de diffamation ou d’injure, il faut agir vite.
Si la priorité est donnée à la suppression du contenu, il faut immédiatement demander la suppression du message, de la vidéo ou de la photo.
Si la priorité est donnée à la poursuite judiciaire de l’auteur, il faut avant tout commencer par un constat d’huissier.
Le constat d’huissier est important, car c’est le premier acte que demande un avocat pour prouver les préjudices de la victime.
Ce constat d’huissier doit notamment démontrer : la matérialité des faits (la réalité des faits), leur date, et l’étendue du préjudice (le nombre de sites où la publication figure et/ou le nombre et le positionnement des résultats dans les moteurs de recherche).
Des délais courts pour agir contre une diffamation ou une injure.
Le premier réflexe est de chercher à savoir si les délais pour agir en justice ne sont pas dépassés.
Malheureusement, comme je l’expliquais dans mon article sur la prescription des délits de presse sur internet, de nombreuses victimes découvrent les textes diffamants ou injurieux beaucoup trop tard, parfois six ou huit mois, voire plusieurs années après leur date de publication.
Or, concernant la diffamation et l’injure, un délai de trois (3) mois court à compter de la première publication des propos litigieux pour saisir la justice.
Pire, ce délai continue de courir après chaque acte judiciaire de sorte qu’il faut en quelque sorte « maintenir en vie » le procès, comme on le ferait avec un malade sous assistance respiratoire.
C’est à peu près la seule procédure qui est dotée d’un régime de prescription aussi court et marquant autant la procédure (civile ou pénale).
En matière d’injure et de diffamation, il convient donc d’être très rapide pour agir.
Pour ce faire, il est recommandé aux professionnels exposés de recourir à un service de veille.
S’agissant des personnes physiques ne souhaitant pas mobiliser un budget pour cela, de simples recherches périodiques dans les principaux moteurs de recherche internet peuvent suffire à leur donner une idée de l’évolution de leur e-reputation.
Ainsi, « s’auto-googliser » ne relève pas du simple effet de mode : c’est un bienfait d’intérêt personnel aussi important que d’aller chez le dentiste pour un check-up.
S’agissant des autres atteintes non couvertes par le droit de la presse (par exemple, les atteintes à la vie privée), les prescriptions sont beaucoup plus longues : elles vont de 3 ans pour les délits jusqu’à 5 ans désormais pour les autres actions en responsabilité civile.
N.B. : pour toutes publications datées du 17 juin 2003 au 17 juin 2008, il faut bien prendre en considération que le délai de prescription, jadis de 10 ans en matière de responsabilité civile délictuelle, a désormais pour date butoir la date du 17 juin 2013 (LOI n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile).
La lutte contre le cyber-harcèlement passe d’abord par un courrier de mise en demeure systématique.
Pour nettoyer son e-reputation, il n’est pas forcément nécessaire d’agir en justice.
En premier lieu, on peut utiliser les différents niveaux « d’alerte » existant parfois sur certains sites.
Ces « alertes » consistent en : 1) un « signalement » d’un contenu offensant à l’autorité de modération de l’éditeur du site internet concerné et/ou ; 2) une procédure de « plainte » interne au site internet concerné.
La difficulté est que ces procédures, sur certains sites internet, ne sont pas forcément fournies avec des explications en français. Ces procédures sont parfois extrêmement formalistes et rigoureuses, aboutissant souvent à une fin de non recevoir.
En outre, certaines qualifications juridiques existant en France ne sont pas toujours répertoriées.
En deuxième lieu, la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (dite « LCEN ») organise une procédure de notification de demande de retrait de contenu applicable aux hébergeurs.
Cette procédure permet de solliciter le retrait d’une information litigieuse, par courrier A.R. revêtant certaines formes précises prévues par ladite loi.
A ce titre, il convient de souligner que la notification d’une demande de retrait est assez formelle et qu’elle répond à des critères précis. Il faut donc manier les faits et les qualifications juridiques avec justesse pour obtenir gain de cause.
En cas de refus de suppression du contenu, la responsabilité de l’hébergeur peut être recherchée, sous réserve qu’on puisse démontrer que la publication litigieuse est bien attentatoire à un droit, et que ledit hébergeur en a été correctement informé de cette atteinte.
En troisième lieu, il est possible, sous l’empire de la même loi, de solliciter la suppression de la publication litigieuse par requête formulée auprès du juge, sans procédure contradictoire contre l’auteur du contenu litigieux dont l’identification n’est pas toujours possible (pour des raisons techniques que je n’expliquerais pas).
Toutefois, il convient de souligner que l’appréciation de la demande de retrait « judiciaire » est soumise à l’appréciation souveraine des juges.
En quatrième lieu, sous réserve que les délais de prescription le permettent, il est possible d’agir en référé (procédure d’urgence) afin de faire cesser les atteintes.
Cette procédure est rapide, mais elle ne permet d’agir qu’en cas d’urgence et d’évidence, afin de faire cesser un trouble, éventuellement sous astreinte journalière, ainsi que d’obtenir, sous certaines conditions, une provision sur les dommages intérêts à demander dans le cadre d’une procédure normale (dite procédure « au fond »).
<b>Enfin, en dernier lieu</b>, le dernier recours est d’agir au fond, c’est à dire au sein d’une procédure judiciaire classique devant un Tribunal statuant sur une demande de dommages-intérêts ou d’autre type de réparation.
Selon les cas, on peut préférer la voie de l’assignation devant un tribunal civil ou la citation directe devant un tribunal correctionnel.
Dans le cadre de l’assignation, on peut demander tous types de réparation, dont des dommages-intérêts et éventuellement une mesure de publication judiciaire du jugement ou d’un extrait du jugement, lorsque ce type de mesure participe à la réparation des dommages.
Dans le cas de la citation directe, il faut être particulièrement délicat dans la rédaction de l’acte de procédure pénal sur lequel s’appuiera le Procureur de la République pour asseoir son réquisitoire (ce qui signifie que si les faits sont mal qualifiés, le Procureur risque fort de requérir… la relaxe !).
De même, une plainte peut être déposée auprès du Procureur de la République, si les faits relèvent bien d’une infraction pénale.
A noter, toutefois, que l’accroissement constant du nombre de délits sur internet encombrent particulièrement les Parquets et que les Procureurs choisissent bien évidemment de poursuivre les dossiers les plus graves.
La lutte contre le cyber-harcèlement doit combiner des actions juridiques et des actions techniques.
Il existe de nombreuses sociétés proposant des services dits d’amélioration de son « e-réputation ».
Parmi elles, seules certaines se sont adossées aux services d’un avocat connaissant bien les problématiques de l’internet.
D’autres sont des sociétés commerciales qui vendent uniquement des services de référencement (mais un référencement « à l’envers » qu’on désigne sous le terme « d’enfouissement ») sans aucune valeur ajoutée juridique.
En effet, ces sociétés seules ne peuvent pas proposer d’agir en justice contre des éditeurs ou des hébergeurs de sites internet où figurent les publications litigieuses.
Or, il faut être clair : il ne suffit pas de pousser la saleté « sous le tapis » pour nettoyer son e-reputation ! Il convient de mener concomitamment des actions juridiques.
Malgré cela, de nombreuses sociétés, dont les plus connues, proposent donc – par défaut – des solutions de « maquillage » consistant à se limiter à tenter de reléguer en page 2 ou 3 les contenus indésirables dans les pages de résultats des moteurs de recherche… mais, dans la plupart des cas, ces contenus ne sont pas effacés !
A l’inverse, l’alliance entre une agence d’e-réputation et un avocat est synergique :
– l’agence assurant la veille et la recherche de contenus peut vérifier, grâce à des outils informatiques, l’étendue exacte des atteintes (notamment si elles sont répétées sur plusieurs sites) ;
– l’avocat assure la qualification juridique des faits et donne les premières indications quant aux voies de recours, leurs coûts et leurs délais ;
– s’agissant des envois de demande de retrait, un partage des tâches peut être opéré, avec l’accord du client, entre l’avocat et l’agence en e-réputation pour minimiser les coûts de traitement ;
– enfin, c’est seulement à défaut de pouvoir effacer les contenus juridiquement que l’agence en e-réputation participe à l’enfouissement des publications dont le retrait s’avère parfois problématique, même avec une procédure judiciaire.
C’est donc la combinaison d’actions techniques et d’actions juridiques, voire judiciaires, qui assure l’efficacité de mesures de nettoyage d’une e-réputation.
Dans tous les cas, la mise en oeuvre de ces actions n’a pas forcément un effet immédiat, même si on note, le plus souvent, une forte réactivité des hébergeurs face à une notification juridiquement bien motivée afin du retrait d’un contenu litigieux.
La protection de l’e-réputation est désormais une préoccupation intéressant tant les particuliers que les professionnels.
2009
Noms de domaine, marques et site-parking : quelle antériorité ? quelle responsabilité ?
Matthieu CORDELIER / 0 Comments /Depuis que les stratégies de référencement et d’accroissement de trafic à des fins publicitaires sont connues des acteurs de l’internet, on a vu tour à tour différentes méthodes d’exploitation des noms de domaines prospérer… parfois au détriment de tiers.
Sans que la liste se veuille exhaustive on dénombre parmi ces méthodes deux des plus connues :
- Le « cyber-squatting » (détention et/ou exploitation frauduleuse d’un nom de domaine homonyme de la marque et/ou du nom de domaine antérieurs d’un tiers) ;
- Le « site-parking » (enregistrement d’un nom de domaine redirigé – le plus souvent via un « redirect 301 » – vers une page contenant des liens publicitaires).
Si les actes de cyber-squatting sont désormais bien connus et facilement condamnés par les tribunaux, y compris par voie de référé, la condamnation de regristrars ou détenteurs de site-parking commence tout juste à rentrer dans les moeurs de nos juridictions.
Dans une affaire opposant le propriétaire d’une marque à la fois au registrar dudit Nom De Domaine et au titulaire du NDD litigieux la Cour de Cassation a pu retenir que le registrar, en ayant placé des liens commerciaux par redirection de l’url acquise par son client ne pouvait pas être qualifié de simple intermédiaire technique assurant le stockage de contenu, au sens de la Loi pour la Confiance dans l’Economie Numérique (LCEN).
Par voie de conséquence, la Cour a conclu que le registrar ne pouvait échapper à sa responsabilité d’éditeur étant entendu que « les principes de loyauté et de libre concurrence attachés à l’exercice de toute activité commerciale imposent à une entreprise intervenant sur le marché de s’assurer que son activité ne génère pas d’actes illicites au préjudice de tout autre opérateur économique« .
LA RESPONSABILITE DES REGISTRAR EN MATIERE DE SITES-PARKINGS PUBLICITAIRES
Ce raisonnement démontre que (en une pierre, deux coups) à la fois le titulaire d’un nom de domaine acquis en fraude des droits d’un tiers pouvait être condamné à transférer ledit nom au titulaire de la marque ou du nom de domaine antérieur…
… et que le registrar, dès lors qu’il recourt à la solution du site-parking (prétendument dans l’intérêt de l’accroissement de la valeur commerciale et de la qualité du référencement du nom de domaine de son client) se rend, par cet acte, lui-même éditeur et donc responsable du contenu diffusé… parfois à l’insu de son client le temps que la redirection mise en place soit écrasée par l’édition d’un site ou par la mise en place d’une autre redirection commandée, cette fois, par le titulaire du nom de domaine.
Mais, si l’on exclue l’atteinte au droit d’un tiers, le recours au site-parking a d’autres conséquences notamment dans la relation registrar – titulaire de nom de domaine.
S’il on peut concevoir que le titulaire du nom de domaine récemment acquis et son registrar sont responsables des atteintes commises aux droits des tiers, qu’en est-il de l’atteinte commise par le registrar aux droits de son propre client ?
Le fait que le client ait adhéré à des conditions générales de ventes le prive-t-il de tout recours contre le registrar qui aura agit ainsi et créé un préjudice audit client, notamment au regard de la concurrence déloyale ?
Pour simplifier les choses, le seul titulaire du nom de domaine est celui au profit duquel l’enregistrement du nom a été validé.
Or, le registrar qui met en place, même par défaut, une redirection du nom de domaine pointant sur un site hébergeant des publicités (quasi-systématiquement très ciblées par rapport à l’intitulé du nom) va profiter directement au registrar lui-même et non au titulaire du nom de domaine.
En effet, les revenus acquis au titre des liens publicitaires en rapport avec l’intitulé du nom de domaine litigieux ne profitent pas au titulaire du nom de domaine, mais bien au registrar.
Cela pourrait caractériser un acte de concurrence déloyale au détriment du client titulaire du nom de domaine.
Toutefois, on peut s’interroger sur le sort d’une éventuelle responsabilité du registrar vis-à-vis de son client, notamment lorsque la faculté de recourir à une redirection est expressément prévue au contrat.
Cependant, il paraît difficile de concevoir que le registrar (souvent également hébergeur) puisse valablement encaisser des revenus publicitaires sans offrir de compensation à son client…
LA PROBLEMATIQUE DE L’EXPLOITATION DU NDD
Reste à savoir si un nom de domaine en site-parking peut être valablement considéré comme exploité.
Or, dès lors que l’on considère que la page publicitaire est éditée par le registrar, et non par le titulaire du nom de domaine, il apparaît difficile de considérer qu’il pourrait valablement y avoir exploitation dudit NDD.
La question trouverait-elle une réponse différente si c’est le titulaire qui exploite un page de publicité ?
La réponse est plus incertaine, car le NDD est bien utilisé à des fins commerciales…
… mais pour répondre totalement à cette question, il convient alors de s’attacher au fait de savoir si, comme le retient la jurisprudence en matière de droit des marques, l’usage fait du nom est un usage sérieux, en rapport avec les produits ou services considérés entre les deux signes (conflit de marque et de nom de domaine ou noms de domaine en conflit entre eux) dont l’antériorité est remise en cause.
L’appréciation appartient souverainement aux juges du fond.